Un film hors du commun imaginé par un homme hors du commun dans des circonstances hors du commun. L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot est le récit d'un film inachevé et de son tournage qui serait déjà une aventure épique même si le scénario avait été mauvais. Seulement voilà, à travers tout ce qui reste du film (les rushes, le scénario, les photos, storyboards, les souvenirs des acteurs et techniciens...), l'expression "chef d’œuvre" transpire.
Ce documentaire couvre à peu près l'histoire, mais si vous voulez savoir à quoi aurait ressemblé le film s'il avait été tourné de façon, disons "académique", procurez vous le film L'Enfer sorti en 1994 et tourné par le regretté Claude Chabrol d'après ce même scénario. Le film est bon. Et on se prend à imaginer ce qu'il aurait pu être dans les mains d'un des plus grands génies du cinéma français. Quelqu'un qui puisse transcender cette histoire "pas fondamentalement passionnante" comme la décrit Bernard Stora dans son intervention, en "nouvel univers plastique".
Avez vous déjà remarqué que les films de Clouzot sont parmi les rares à avoir du succès aux États-Unis? Ils sont restaurés, sortis chez Criterion plusieurs fois. Si vous avez l'occasion, allez voir les Diaboliques, l'Assassin habite au 21, Quai des Orfèvres, le Corbeau, Le Salaire de la Peur... Et si vous n'avez pas l'occasion... créez là ! On ne sait pas ce qu'est un bon film français si on n'a pas vu ces films.
L'Enfer semble avoir été un terrain d'expérimentation pour Clouzot : puisque le film traite d'un mari d'une jalousie compulsive, Clouzot va tourner l'histoire en noir et blanc et des séquences en couleur pour illustrer sa folie, des hallucinations... Et nous sommes alors transportés dans un kaléidoscope où Romy Schneider (tout simplement divine dans ces images) est sublimée comme jamais actrice ne l'a été et ne le sera probablement plus jamais.
Un livre rassemblant des photos et des photogrammes du film permet d'avoir un aperçu de cette beauté, mais la véritable magie est dans le mouvement.
Mais le film évoqué ne doit pas éclipser les mérites du documentaire. Serge Bromberg, que le grand public connaît comme l'animateur de Cellulo (une émission géniale qui faisait re-découvrir des courts métrages d'animation restaurés sur la chaîne "la cinquième"), est un grand passionné du cinéma et producteur de restaurations de films. Grâce à cette homme et la compagnie Lobster film, de nombreux films ont été sauvés de l'oubli.
Et celui-ci méritait bien un traitement de faveur : non seulement il existe beaucoup d'images de préproduction, de rushes, mais l'histoire du tournage est fascinante : la personnalité de Clouzot suffit aux intervenants à trouver de quoi parler. La tension plus de cinquante ans après le tournage est encore palpable. Une sorte de malédiction semble s'acharner sur ce film.

Comme le son n'a pas été conservé, on n’effleure que la surface de ce que ce film aurait pu être : une bande retrouvée nous montre que Clouzot voulait avoir un son déformé, lui aussi novateur. Néanmoins, les images sont illustrées par une musique magnifique de Bruno Alexiu. Il s'agit d'un vraie découverte pour moi et je vous encourage à acheter cette musique en CD.
En revanche, le film est disponible en Blu-ray.
C'est tout pour aujourd'hui les amis ! A bientôt !
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