samedi 29 octobre 2016

Suzanne Bianchetti, l'Impératrice du cinéma

Suzanne Bianchetti. Voilà un nom auquel bien des actrices aspirent sous la forme d'un prix décerné chaque année à la plus prometteuse d'être elles par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. L'idée de base était de l'attribuer à un acteur prometteur, homme ou femme, pourvu qu'il ait au moins deux films à son actif. Dans les faits, il ne fut décerné qu'une fois à un homme, Roger Dumas, en 1959.

Cette année, c'est Camille Cottin, célèbre principalement pour son rôle dans La connasse, qui l'a remporté.

Mais savez-vous qui était Suzanne Bianchetti ? Le prix fut créé par son mari, l'historien du cinéma René Jeanne (en partie responsable de la création du festival de Cannes également) lorsqu'elle mourut à seulement 47 ans.

Née le 24 février 1889 à Paris, Suzanne a le soutien de sa famille pour choisir la voie qui lui plaît. Elle apprend donc le chant et la comédie et ses apparitions font parfois l'objet d'articles de journaux : en juin 1910, sa performance dans des adaptations musicales d'Esclavy au salon de Mlle L. Popelin est apparemment un grand succès. En mars 1911, c'est au tour de Mme Ernest Pellerin de l'inviter avec Mlle Fajole pour lire de la poésie.

En 1913, elle épouse René Jeanne et à partir de ce moment, ce n'est qu'une question de temps pour qu'elle commence une carrière au cinéma, car il est un des critiques les plus respectés de l'époque en ce domaine. D'ailleurs, des articles publiés au moment de sa mort soulignent qu'elle a débuté grâce à lui, et cela malgré ses nombreuses déclarations du contraire de son vivant.

Des débuts cinématographiques militaires

Son premier essai est un film de guerre, toujours visible sur le site internet de l'EPAD, intitulé La femme française pendant la guerre qui, comme son nom l'indique, chronique le rôle de la Femme lors de la Première Guerre mondiale. Réalisé par Alexandre Devarennes, le film décrit leur vie à la ville et à la campagne et leur appropriation des différentes tâches ordinairement réservées aux hommes, tout en assumant leur rôle de mère. Suzanne joue le rôle de la mère laissée seule pour s'occuper de son enfant.
Plusieurs sources parlent d'une sortie pendant la guerre, mais on nous montre les courageux ouvriers restés à leur poste lors du raid du 30 janvier 1918. Si le film est effectivement distribué avant la fin de la guerre, cela doit être dans les derniers mois. Suzanne se souvient qu'elle visite les studios en 1917 pour voir une de ses amies de la Comédie Française, Andrée de Chauveron, qui est en retard pour le tournage et ce serait à la demande de M. Devarennes qu'elle la remplace. Elle dit n'avoir fait que du théâtre amateur jusqu'alors et que cette petite scène la terrorisait plus que de jouer sur scène.
Trois familles avec Henri Bosc

Comédie, figuration, et mélodrame

Après cela, elle apparaît en 1919 dans quelques films du même réalisateur. D'abord un autre de propagande écrit par son mari et intitulé Trois familles où elle partage l'écran avec des vedettes établies de l'époque comme Séverin-Mars, Émile Drain, Henri Bosc, Berthe Jalabert et Jean Toulout. Le film sort à Paris le 24 janvier 1919 et montre "de façon bien documentée et souvent émouvante, ce qu'ont été les relations entre la France et les États-Unis depuis le début de la guerre. Les paysages dans lesquels il se déroule sont les plus beaux de Paris et de la Touraine."
Elle s'essaie ensuite à la comédie dans Riquette et le nouveau riche et Riquette et sa mère. Dans le second, Suzanne fait tourner son propre chien Crapotte.
Flipotte et le nouveau riche avec Sémery

En 1919 toujours, elle tourne son premier film pour le célèbre réalisateur Jacques de Baroncelli qui l'engage pour ce qu'elle considère comme "de la figuration" aux côtés de l'acteur Gabriel Signoret, auprès duquel elle dit beaucoup apprendre. La comédie s'appelle Flipotte et raconte l'histoire d'un voleur qui se fait passer pour un homme riche parti en voyage en Australie. Elle y croise également le chemin d'une actrice plus jeune mais déjà plus célèbre qu'elle : Andrée Brabant.

Henri Desfontaines l'engage ensuite pour son film Sa gosse, sorti le 21 novembre 1919 avec Elmire Vautier. Une nouvelle fois, son rôle n'est pas assez consistant pour attirer l’œil des critiques. Lorsqu'on en parle dans Ciné pour tous le 22 novembre 1919 on mentionne surtout le petit budget apparent.
Une brute avec André Nox

Comœdia considère le film de Daniel Bompard Une brute comme ses débuts lorsqu'ils annoncent la projection presse le 6 juin 1920. Ils prédisent qu'elle sera beaucoup remarquée. Suzanne dédaigne pourtant le rôle comme étant trop mélodramatique et le seul souvenir agréable qu'elle en garde est son amitié avec les acteurs André Nox et Jean Signoret.

Le 14 novembre 1920, le même journal lui trouve "charme et sensibilité" dans La Marseillaise (ou La naissance de la Marseillaise) où elle partage l'écran avec Varny, jeune premier de la Comédie Française et M. Allard, baryton de l'opéra comique. Ce dernier joue le Baron réputé avoir chanté le premier le futur hymne et elle joue son épouse. Le film est exploité avec orchestre et chœur qui jouent le célèbre air.

Le rêve avec Gabriel Signoret
Comme beaucoup d'autres avant elle, elle joue les faire-valoir auprès de comiques populaires. Pour Humour-Film, elle tourne Agénor, Chevalier sans peur à la fin de 1920 avec Lucien Callamand qui, sous la direction de Floury, joue le rôle titre d'une série de comédies Agénor dont c'est là le troisième avatar. Comœdia remarque "la fine et gracieuse Suzanne Bianchetti".

Début 1921, ses rôles s'étoffent comme dans Le rêve de Jacques de Baroncelli, de nouveau avec Andrée Brabant. Le même réalisateur lui donne un rôle dans Le Père Goriot la même année. Lorsqu'on leur présente le film le 4 octobre 1921, Comœdia la juge capable de bien plus qu'on ne lui demande.

On lui offre alors un rôle dans le prochain projet de Léon Poirier : Paris où elle doit avoir une scène en avion, ce qu'elle considère comme "le seul sport qui me plaît". Son baptême de l'air en 1914 lui avait fait fort impression. Malheureusement, le film est annulé avant même le premier tour de manivelle et pour Suzanne, l'année se termine par un film de Pierre Colombier intitulé Soirée de Réveillon que l'on projette avec à-propos lors d'une soirée de noël le 23 décembre 1921.
Soirée de réveillon avec André Clairius & Marguerite Madys

1922, le tournant avec "Jocelyn" et "Les mystères de Paris"

Julie dans Jocelyn

Avec Anne-Marie Laurent dans Jocelyn
Léon Poirier persiste à vouloir travailler avec elle et lui confie le rôle de Julie, la sœur du personnage principal de sa prochaine adaptation d'un poème de Lamartine : Jocelyn. Jocelyn sacrifie son propre bonheur pour que sa sœur Julie puisse épouser l'homme qu'elle aime, car sa mère ne dispose pas de la fortune nécessaire pour les lancer tous les deux dans le monde.

Dès le 14 juin 1922, on peut lire dans la presse : "Mme Suzanne Bianchetti a du charme et du talent. regrettons qu'on ne lui ait pas fourni l'occasion de nous faire admirer plus longtemps l'un et l'autre.". C.F. Tavano dans le Le rappel pense qu'elle est "trop rare à l'écran".






Les mystères de Paris

Le succès (le film est encore projeté à Paris en avril et juin 1923) lui gagne l'attention du public. Elle commence à recevoir du courrier de ses admirateurs et son film suivant et donc une grande production de la Phocéa qui adapte le célèbre roman d'Eugène Sue : Les mystères de Paris. Le réalisateur Charles Burguet lui fait jouer Clémence d'Harville, une marquise, aux côtés de l'une des plus célèbres actrices du cinéma muet, Huguette Duflos. À la sortie du film le 6 octobre 1922, Suzanne est désormais un visage avec lequel il faudra compter dans le cinéma français.

Cover Girl


L'affaire du courrier de Lyon avec Laurence Myrga
Le 30 novembre 1922, on la trouve sur la couverture de Mon ciné qui contient une interview de l'actrice dans son appartement parisien, situé 6 rue d'Aumale (elle déménagea ensuite rue Chaptal, dans le même quartier), avec son chat Pacha et son nouveau chien Vulcain (Crapotte était morte d'une grippe). Elle y raconte ses débuts et des anecdotes du film qu'elle vient de tourner (depuis le 1er août si l'on en croit l'actrice interrogée en décembre par Ciné-Miroir) : L'affaire du courrier de Lyon, une saga en trois épisodes et un prologue, une nouvelle fois réalisée par Léon Poirier où elle retrouve Myrga et Roger Karl avec plaisir. Ce film inspirera le peintre Raymond Pallier pour la réalisation d'un portrait de l'artiste. Mais elle reste muette sur ses projets futurs.

Il se trouve que deux réalisateurs reconnus, Baroncelli et Abel Gance, souhaitent aborder tous deux le même sujet. Comœdia annonce le 20 décembre 1922 que Baroncelli termine ses extérieurs de "Beatrix"en Belgique et va bientôt commencer les intérieurs aux studios d'Épinay avec Sandra Milowanoff dans le rôle-titre, Eric Barclay et "la charmante Suzanne Bianchetti". Au début de 1923, Gance renonce apparemment à son projet rival.
On annonce que le film est terminé le 9 mars 1923, on le montre à la presse en avril et on le sort sous le titre La légende de soeur Béatrix le 28 décembre 1923. Mais avant cela, L'affaire du courrier de Lyon sort finalement le 9 mars 1923 (un épisode à la fois) ce qui fournit une bonne exposition médiatique à notre vedette en herbe.
Violettes impériales

Violettes Impériales, début des rôles couronnés

Le 5 mai 1923, on annonce qu'elle est choisie par Henry Roussell pour jouer dans Violettes Impériales avec Raquel Meller et André Roanne. Pour ce film, quelques extérieurs sont tournés en Espagne mais on tourne surtout au studio d'Épinay. Un article suivant de J.K. Raymond-Millet publié en décembre 1926 rapporte sa rencontre avec l'actrice à Seville durant le tournage de ce film. "J'appris que Suzanne Bianchetti est superstitieuse. À plusieurs reprises, le chiffre 13 lui a porté bonheur et elle lui garde toute sa reconnaissance. Elle porte toujours sur elle un fétiche de corail pâle, qui est le masque de la comédie, et la préserve de tous les maux." Il mentionne également à quel point ce film est important dans sa carrière, tant nationale qu'internationale car il est distribué dans le monde entier. On apprend aussi qu'elle aime les chiens, sauf quand ils aboient, qu'elle mange du roast beef et du chocolat au petit déjeuner, qu'elle aime voyager et lit Paul Claudel. Ciné miroir révèle aussi les dessous du tournage le 12 décembre 1923 : après une nuit de tournage aux studios d'Épinay, toute l'équipe retourne à Paris... et laisse Suzanne en plan. Sans train ni automobile pour l'emmener, elle doit attendre que le chauffeur de la limousine se rende compte de l'oubli et retourne la chercher.

Avant même la projection presse de Violettes Impériales, Jacques de Baroncelli annonce le 4 octobre 1923 un autre film avec Sandra Milowanoff et Bianchetti dont il a lui-même assuré l'écriture : Un homme riche qui sera plus tard renommé La flambée des rêves. Peu après, le 20 octobre, c'est René Leprince qui rend public l'engagement de l'actrice pour le rôle de la vénéneuse blonde Princesse Mila Serena dans L'enfant des halles, un autre cinéroman en huit chapitres.
La méchante Mila Serena arrêté pour le meurtre de PeauDure dans L'enfant des Halles

Le 1er novembre, c'est le film de Baroncelli que Suzanne entame en compagnie de Charles Vanel et qui ne lui prendra guère plus d'un mois. Le 13, Violette impériales est présenté à la presse au Marivaux et les louanges sont unanimes. Suzanne  a fait honneur à son prestigieux modèle, l'impératrice Eugénie. Parmi les nombreuses critiques, celles publiées dans Le Petit Journal ET Paris Soir sont opportunément rédigées par son mari. Mais soyons justes : c'est une aide superflue. Jacques Vivien dans Le petit Parisien écrit : "Mlle Bianchetti a approché de quelques ressemblances avec l'impératrice, telle que la représente ses portraits, au temps de sa beauté."

Le 28 décembre 1923, La légende de Sœur Beatrix sort au Palais Rochechouart à Paris. Dans sa critique du 13 janvier 1924 dans La rampe, L. Valter rapporte que "Mlle Bianchetti n'a qu'une silhouette à peine esquissée dans ce film, mais elle arrive cette fois-ci encore à lui apporter beaucoup d'allure et de charme".
L'enfant des halles avec Lucien d'Alsace & Francine Mussey

L'enfant des Halles, La Brière

avec Gabriel Signoret dans L'enfant des Halles
Le premier épisode de L'enfant des Halles est présenté le 27 février 1924 au Marivaux et une fois encore, la presse apprécie le film ainsi que la composition de Suzanne. Le public se range à cet avis à sa sortie le 11 avril 1924. Dans La rampe, du 4 mai 1924, L. Valter écrit : "Mme Suzanne Bianchetti représente une belle dame aussi séduisante que dangereuse. Elle est belle et séduisante sans difficulté et si elle inspire plus d'admiration que de méfiance, ce n'est pas le public qui se plaindra. Ni moi non plus."

Dès le début de mars 1924, Mon ciné publie régulièrement des entrefilets sur le tournage de La Brière, d'après Alphonse de Châteaubriant, où Léon Poirier et son épouse Jeanne semblent faire régner une atmosphère familiale à la campagne. Les intérieurs sont tournés en avril aux studios Gaumont, le films est présenté en janvier, puis sort le 24 avril 1925.

Avant cela, après une répétition générale le 20 mars 1924 (souvenez-vous qu'à l'époque, le cinéma était un spectacle complet et les grands films étaient accompagnés d'orchestres symphoniques lors des premières) accessible uniquement sur invitation, la première de Violettes Impériales est finalement donnée vendredi 21 mars 1924 au Marivaux.

Les deux films se partagent les écrans de Paris au même moment et Suzanne Bianchetti est au mieux de sa popularité. L. Valter considère, le 29 juin que: "Mlle Suzanne Bianchetti se classa définitivement, après un stage sérieux, parmi les meilleures interprètes de cinéma."
Mariage d'Eugénie et Napoléon III dans Violettes Impériales

Le 5 juillet 1924, Cosmograph présente enfin La Flambée des rêves de Baroncelli aux journalistes. Le film sort en octobre de la même année et Suzanne y joue le rôle de "l'autre femme" aux côtés d'Eric Barclay, Charles Vanel et de Sandra Milowanoff. Le 19 juin 1924, Mon ciné publie une photo de Suzanne sur le plateau qui balaie "courageusement" le sol du studio en fourrure et négligé de soie.
Sur le plateau de La flambée des rêves

Une impératrice internationale, Madame Sans-Gêne

On passe le mois d'octobre à Compiègne et décembre à Fontainebleau pour le tournage de Madame Sans-Gêne. Suzanne se souvient qu'il était difficile de simuler un beau soir d'été devant un feu d'artifice un 12 décembre alors que la température était glaciale. Malgré l'autorisation d'utiliser le lit de l'impératrice, elle ne dispose ni de drap, ni de matelas. La femme du réalisateur fournit le premier, mais on ne trouva pas le second, de sorte que la pauvre actrice passa un bien mauvais moment lors du tournage de cette scène.

Cinéa annonce ensuite que Suzanne fait partie de la distribution du film de Jacques de Baroncelli : Veille d'armes. Malheureusement, il semble que son rôle soit finalement attribué à l'actrice britannique Annette Benson.
Vient ensuite Serge Nadedjine pour L'Heureuse mort (annoncé précédemment par Cinéa sous le titre La mort heureuse en août 1924) avec Nicolas Rimsky le 13 février 1925 qui est "un film gai" dont parle Jacques Vivien dans Le petit parisien en ces termes : "Un peu trop de macabre se mêle au comique, peut-être dans ce film qui a, d'ailleurs, des parties réussies par une sensible recherche d'expression. Il est joué (...) fort agréablement par Mlle Suzanne Bianchetti".

Le nègre blanc avec Nicolas Rimsky

À peine deux jours après sa sortie, on annonce un second film avec ces deux mêmes acteurs produit par Albatros : Le nègre blanc. On doit se souvenir que le terme était socialement acceptable à l'époque dans les titres de film et ce encore des années plus tard (Pensez aux Dix petits nègres mais aussi à des titres encore moins respectueux comme Bouboule Ie, roi nègre de 1934 !). En mars, les journaux rapportent que Serge Nadejdine, le réalisateur, est remplacé pour d'obscures raisons par Henry Wulschleberg, et c'est finalement Rimsky lui-même qui devient le réalisateur principal. Les extérieurs se tournent à Nice et en mai, le théâtre Apollo est utilisé pour la première fois dans un film pour une scène où Rimsky dirige un orchestre alors que Suzanne chante (bien sûr, les deux artistes miment pour la caméra). La présentation par Les films Armor à l'Artistic Cinéma le 12 septembre 1925 précède de très peu la sortie le 18, contrairement à l'usage. Simone Brive regrette dans les pages du Rappel que "Suzanne Bianchetti si jolie, si fine, aurait mérité depuis longtemps le titre de star si le cinéma français, tel son riche confrère d'Amérique, en créait."
Le firmament de France (Eve Francis,Jean Toulout, Suzanne Talba, etc.) Suzanne est la quatrième en partant de la droite, deuxième rang.

Dans le même temps, Suzanne Bianchetti reste très active socialement et participe à de nombreuses premières, ainsi qu'à des diners, avec son époux: on la remarque à Mogador lors de la première parisienne de Monsieur Beaucaire avec Rudolph Valentino le 26 février 1925. En avril, elle est l'une des nombreuses étoiles qui vend des programmes pour La nuit enchantée, un spectacle produit par M. Sabatier, président du comité des fêtes de Paris qui a également invité Andrée Brabant, Eve Francis, Huguette Duflos, Gina Relly, Charles de Rochefort... Le 23 avril, on la retrouve à un dîner avec son mari organisé par Michel Carré pour les artistes et les distributeurs... et même à l'enterrement du réalisateur Robert Saidreau le 9 décembre bien qu'ils n'aient jamais collaboré. Toujours en 1925, elle est de nouveau portraiturée par Cipria et l’œuvre est exposée au salon en avril.

En mai 1925, des articles commencent à naître sur la version américaine de Madame Sans-Gêne, film Paramount américain tourné en France par Léonce Perret avec Gloria Swanson : le film est de toute beauté et promet d'être encore meilleur en France qui n'aura pas à subir les coupes faites pour convenir au goût d'outre-atlantique. Cependant, grâce à cette première version, Suzanne Bianchetti bénéficie d'une exposition aux États-Unis dans une grosse production où elle incarne une nouvelle fois une souveraine : l'impératrice Marie-Louise. Même avec des scènes supplémentaires, tel qu'on le présente le 16 décembre 1925 à l'Opéra Garnier (les premières représentations le 15 sont des répétitions), les critiques regrettent l'omniprésence à l'écran de Gloria Swanson aux dépends d’Émile Drain ou de Suzanne qui n'apparaissent "que lorsque l'absolu nécessité de leur rôle l'exige" Suzanne révèle d'ailleurs dans ses mémoires qu'elle a été attaquée dans sa 5 cv alors qu'elle revenait de Compiègne : une de ces amies conduisait et trois hommes les ont attaquées qui furent plus tard attrapés et condamnés, mais malgré une sévère blessure à la main due au verre brisé, elle continua à tourner avec des gants et fut priée de garder l'affaire pour elle car la production se devait contractuellement de limiter la publicité autour de Gloria Swanson uniquement.
Les aventures de Robert Macaire avec Jean Angelo

Les aventures de Robert Macaire


Louise de Sermèze dans Robert Macaire
Le 26 mai 1925, on publie qu'elle sera la vedette principale du cinéroman en 5 épisodes de Jean Epstein pour Albatros : Un amour de Robert Macaire, titre changé un mois plus tard en Les aventures de Robert Macaire avec Jean Angelo. Les extérieurs sont tournés à Grenoble en été 1925 et le travail en studio, commencé en septembre, se termine à la mi novembre. La projection presse a lieu le 4 décembre 1925. De son actrice, le réalisateur loue sa capacité à lier, dans un rôle complexe, une noblesse d'attitude et une passion qui semblaient impossible à concilier. Le premier épisode sort le 11 décembre et les suivants sortent au fil des semaines. Une version condensée (moins de 3.000 m) est assemblée par Jean Epstein lui-même en mars mais le film complet a été préservé et est même disponible en DVD, mais uniquement dans un coffret regroupant plusieurs œuvres de Jean Epstein.

Le Max Linder obtient de la Mappemonde films l'exclusivité à partir du 10 novembre 1925 de La ronde de nuit réalisé par Marcel Silver avec Raquel Meller dans le rôle de Stéfania et Suzanne Bianchetti dans celui de la Princesse Hedwige. La sortie générale commence le 19 mars 1926.

La Marie-Antoinette de Napoléon

Le 21 janvier 1926, elle assiste à l'ouverture du nouveau studio des Ursulines. Le 28 mai, Raymond Villette la nomme "la plus racée de nos artistes de cinéma" dans Le gaulois.
Son palmarès récent de rôles royaux (Madame Sans-Gêne se joue toujours à travers le pays) lui fait décrocher le rôle convoité de Marie Antoinette dans le légendaire chef-d’œuvre d'Abel Gance Napoléon, comme on l'annonce le 5 juin 1926. D'ailleurs, Suzanne révèle qu'elle devait jouer Eugénie de nouveau, mais que le plan de tournage de ces scènes a été bouleversé de sorte que Gance lui a demandé de jouer la Reine à la place. Le rôle est réduit à une simple scène relatant les évènements du 10 août, ce qu'elle regrette d'autant plus qu'il s'agit là de son personnage historique favori. Elle se souvient que l'enfant qui incarnait Louis XVII refusait de paraître effrayé malgré les besoins de la scène et les efforts de l'équipe. Il finit par crier : "Je n'aurai pas peur ! Je refuse ! J'ai l'estomac délicat et ça me donne la courante." Si vous voulez voir cette scène, ou mieux encore si vous souhaitez voir tout le film dans une superbe version restaurée, il sort en Blu-ray ce mois-ci.
Marie Antoinette dans Napoléon

Casanova

Plus tard, cette même année, Suzanne joue une nouvelle souveraine : Catherine II de Russie dans Casanova d'Alexandre Volkoff produit par Ciné Alliance et distribué par La société des Cinéromans - Films de France en 1927. Ce film devait être le dernier que l'acteur russe Ivan Mosjoukine était censé tourner en France avant son départ pour les États-Unis. On tourna jusqu'en décembre 1926 et son dernier jour fut bien triste pour toute l'équipe qui, comme lui, était majoritairement composée de migrants russes. La presse découvre le film à L'Empire le 22 juin 1927 ainsi que les modèles des costumes utilisés dans le film que l'on expose à l'entrée du cinéma. On trouve Suzanne "parfaite". Ce ne fut pas une promenade de santé pourtant : Volkoff voulait un effet de grandeur lorsque l'impératrice fait son entrée avec un manteau de velours flanquée d'une traîne de 20 mètres qui força l'actrice à mettre un corset en cuir qui devait supporter le poids tout au long des 13 prises nécessaires pour satisfaire le réalisateur.
Casanova avec Ivan Mosjoukine
L'exclusivité a lieu au Marivaux "avec des sous-titres français et anglais" (=intertitres) et une séquence de carnaval colorée au pochoir le 13 septembre et la sortie générale a lieu le 23 décembre. Même si le film n'a pas été dignement préservé après sa sortie initiale, un travail de restauration entrepris dans les années 1980 à partir de négatifs de la version française et des versions étrangères, ainsi qu'un positif de la séquence couleur. Le résultat n'est malheureusement pas disponible en vidéo.

Cette suite de rôles l'incite à publier un long article : "Quand j'étais impératrice" en août 1927 dans Les lectures pour Tous.

En février 1927, elle figure parmi les personnalités qui signent la pétition de soutien à Charles Chaplin, récemment accusé de bigamie. Le 9 janvier 1928, elle assiste à l'enterrement de l'actrice Claude France qui s'est suicidée.

Verdun, visions d'Histoire

Verdun, visions d'Histoire
Pour son film suivant, Suzanne part en Allemagne, puis tourne les intérieurs chez Gaumont avec Léon Poirier, après quoi l'équipe repart en extérieur en France tourner Verdun, visions d'Histoire. Ce film reste, à ce jour, l'un des meilleurs sur la première guerre mondiale car plusieurs soldats y jouèrent leur propre rôle et certaines photographies de tournage furent par la suite utilisées par erreur comme illustrations supposées réelles du conflit dans les livres d'Histoire. Le réalisateur ironise sur le fait que le problème principal sur le film était de trouver de jeunes hommes arborant la moustache car la mode était alors de la raser. La projection presse a lieu le 7 novembre 1918 et sort le lendemain à l'opéra afin de pouvoir symboliquement donner une représentation peaufinée le 11 novembre 1928 avec une musique originale d'André Petiot, habitué à collaborer avec Poirier. Comme déjà mentionné, bien des acteurs ne sont pas des professionnels, mais on fait appel à quelques vedettes, dont Suzanne, qui pour la plupart incarnent brièvement des figures typiques de la guerre, telles le mari, la femme, la mère... Le film est disponible en DVD.

Le 23 avril 1928, elle entame le tournage d'Embrassez-moi, une comédie de Robert Péguy aux studios d'Épinay. Mais Péguy tombe malade et Max de Rieux le remplace les premières semaines, suivant fidèlement le scénario. La presse peut voir le film le 26 septembre 1928 aux Folies Wagram et le film sort finalement le 6 février 1929. Parmi les critiques, on peut lire dans Le populaire: "Suzanne Bianchetti a remporté un vif succès personnel. Sa création, fort différente de celles de Verdun visions d'Histoire et de Cagliostro, a montré une fois de plus la souplesse de son talent et sa facilité d'adaptation aux situations les plus diverses."

Le 5 mai 1928, Le gaulois annonce que le célèbre réalisateur Maurice Tourneur va tourner sa version du Capitaine Fracasse, assisté de Henry Wulschleger, et Suzanne Bianchetti est, de même que Pierre Blanchar et Mendaille parmi les artistes pressentis pour l'interpréter. Bien que le film fut finalement réalisé avec certains d'entre eux, ni Maurice Tourneur, ni Suzanne n'en feront partie.
Marie Antoinette dans Cagliostro

Une nouvelle Marie Antoinette pour Cagliostro

Du 4 novembre 1928 au 5 janvier 1929, Suzanne reprend le rôle de Marie Antoinette dans Cagliostro au studio Natan, rue Francoeur et à Épinay avec le réalisateur autrichien Richard Oswald. Cette fois, aucun extérieur n'est nécessaire et les 40 décors italiens sont entièrement créés en studio, au grand dam de certaines critiques qui lui reprochent également son rythme lent après l'avoir vu le 22 mai 1929. La sortie publique n'a lieu, elle, au Palais Rochechouart que le 4 juillet 1930.
Une photo de l'actrice apparaît dans Pour Vous le 20 décembre 1928.
Un article dans L'écho d'Alger révèle que : "On aperçoit à peine Mme Suzanne Bianchetti, juste ce qu'il faut pour nous laisser des regrets. Il y a quelques tableaux en couleur qui ne rehaussent ni les éclairages uniformément 'sombre[s]',   ni les tons noirs longtemps favorisés en Allemagne et qui ont fait école en Amérique et qui fatiguent quand ils ne sont pas absolument justifiés." De nos jours, une version restaurée de Cagliostro est disponible en DVD. Malheureusement, la moitié du film est perdue et la source principale de la restauration est la version raccourcie pour Pathé-baby augmentée de quelques scènes qui avaient été censurées en Suède et de quelques autres copies.

Suzanne en Allemagne

En janvier, elle part pour Berlin filmer un petit rôle dans Der Mann der nicht liebt, ou "Théâtre" comme l'annonce alors dans la presse, une adaptation de Kean par Alexandre Dumas avec Suzanne Delmas, Colette Darfeuil et une distribution allemande. Lorsque la projection presse allemande est rapportée dans les journaux français le 17 juin 1929, on parle d'un succès mais lorsqu'on annonce l'équivalent français donné par M.B. Films à l'Empire le 9 juillet, le film est rebaptisé L'éternelle idole. Les critiques françaises l'apprécient aussi Suzanne, même si dans le rôle de la Duchesse de Rogall, elle apparaît fort peu à l'écran.
Suzanne et l'équipe de Der Mann der nicht Liebt (L'éternelle idole)

En mars 1929, elle va à Nice pour un nouveau rôle et le 10 juin 1929, la presse peut voir Les mufles de Robert Péguy d'après le roman d'Eugène Barbier. On y remarque bien quelques incohérences, mais Suzanne Bianchetti est jugée "excellente d'un bout à l'autre". Cinéa la distingue même au milieu d'une distribution "inégale". L'Omnia s'assure l'exclusivité du film du 12 au 18 juillet et Le populaire écrit "Dans ce film, Suzanne Bianchetti remplit avec son autorité coutumière un rôle totalement différent de ses précédents créations". Elle joue en effet le rôle d'une femme frivole qui quitte son mari après l'avoir mené à la ruine pour le premier banquier qui croise sa route. Un rôle très différent de ses rôles royaux habituels.
On sort le film le 15 novembre 1929 sur tous les écrans.
Les mufles

Le tournant du parlant

Le film parlant n'est plus une rumeur à cette époque et dès 1928, Comœdia demande à l'actrice son avis sur la question : pour elle, il s'agit d'un bond en arrière puisqu'il prive le film de son caractère international et elle s'inquiète de la difficulté des spectateurs à focaliser leur attention sur l'image s'ils doivent prêter attention à un dialogue en même temps, tout comme un amateur de musique fermera ses yeux pour mieux l'écouter. En août 1929, lorsque Le chanteur de Jazz et d'autres films parlants américains envahissent la capitale, elle maintient que le film muet sera vite redécouvert, mais aussi que le film parlant est amené à évoluer rapidement.
Dans la pièce de Guitry Histoires de France

Peut-être afin de se préparer à des rôles parlants, elle accepte de revenir à la scène au théâtre Pigalle pour 120 représentations de la pièce de Sacha Guitry, Histoires de France. Elle est en territoire connu puisqu'elle joue le rôle de l'impératrice Eugénie, comme dans Violettes impériales. Jean Tarride tourne un petit documentaire lors des répétitions de la pièce en septembre 1929 et la première est également filmée si l'on en croit Cinémagazine de janvier 1930.

Au début de 1930, les parlants américains sont progressivement remplacés par des films aux dialogues en français. Cependant, aucun studio en France n'est pour l'heure correctement équipé pour tourner ce type de production. Ainsi des films comme Parade d'amour avec Maurice Chevalier sont en fait tournés à Hollywood et La nuit est à nous en Allemagne avec des acteurs francophones, parfois avec un petit accent. Les vedettes françaises étaient censées voyager si elles voulaient faire connaître leurs voix.

Comœdia annonce le 14 mars 1930 que l'acteur Pierre Juvenet a pris le Nord-Express pour Berlin afin de tourner Le Roi de Paris avec Mary Glory et Suzanne Bianchetti. Il s'agit là du premier parlant de Suzanne qui joue le rôle d'une Duchesse sur le retour qui se compromet avec un gigolo. Elle est de retour avant le mois d'avril pour tourner un autre parlant, mais cette fois, dans l'hexagone. Dans sa critique du 15 août 1930 du Le Petit Parisien, Jacques Vivien écrit : "Ivan Petrovitch, Gabrio, Mary Glory, Suzanne Bianchetti font ce qu'ils peuvent pour animer ce film, qui a, sans doute, quelques parties attestant du soin, mais qui, dans son ensemble, est assez pâle." On s'étonne également que tel policier ou telle soubrette parisienne ont un accent "tudesque" (et pour cause). L'accent affecté du personnage principal supposé argentin déclenche également quelques rires involontaires (Comœdia 2 août 1930).
Princes de la cravache avec Michèle Wagner

A la fin du mois d'avril, on tourne à Chantilly les extérieurs de Princes de la cravache réalisé par Marcel L. Wion sur le champs de courses avec des jockeys célèbres de l'époque: Bedeloup, Loiseau, Niaudot, Bonaventure, et Wion lui-même. Hebdo film précise qu'on tourne plusieurs versions pour chaque langue.

Retour à Verdun

Le 12 octobre 1931, la Compagnie universelle cinématographie présente à la presse une version parlante de Verdun, visions d'Histoire renommée Verdun, souvenirs d'Histoire. Après seulement 3 ans, a nouveauté du son est jugée comme suffisamment importante pour remonter, partiellement retourner et ressortir le film. En si peu de temps, les visions sont devenus des souvenirs. On ajoute du son )à plusieurs scènes du film précédent et d'autres sont tournées au début de 1931 : un groupe d'enfants visite Verdun et leur instituteur est le narrateur de l'histoire. La plupart des acteurs de 1928 reviennent et Suzanne est engagée en mai pour les rejoindre. Le film en novembre de cette année. Il est également disponible en DVD, ce qui offre une unique opportunité de comparer avec la version muette. A dire vrai, certains effets sonores utilisés dans les scènes de bataille ont un effet comique regrettable sur un public moderne mais l'utilisation du son n'est pas sans mérite.

Le 26 décembre 1931, Hebdo Film annonce que Léon Poirier vient d'engager Suzanne Bianchetti pour un rôle important dans prochaine production musicale : La folle nuit, même s'il compte uniquement produire et superviser la réalisation par un nouveau réalisateur : Robert Bibal. Une toute jeune Simone Renant commence sa carrière dans cette comédie légère où Suzanne devient Clotilde, gouvernante des six filles d'une Duchesse, et fait de nouveau des merveilles dans un film à costume de plus. Le tournage se termine au début de février 1932 et le film est montré à la presse le 8 avril 1932. Même si on s'entend pour le considérer comme un "spectacle léger", il reste "un divertissement de bonne compagnie" et "Suzanne Bianchetti est inimitable dans ces sortes de rôle qui réclament avant tout du charme et de la grâce". Cinéa, par contre, la trouve "quelconque" dans ce rôle.

L'incarnation vivante et parlante d'Eugénie

Lorsque La fête impériale, une commémoration de la visite de la Reine Victoria à Versailles, est organisée par Jean le Seyeux à Monte Carlo le 29 février Suzanne Bianchetti est naturellement invitée à apparaître sous les traits... de l'impératrice avec d'autres vedettes comme Noël-Noël.
Violettes impériales (1932)

Après ses apparitions muettes et sur scène dans le rôle d’Eugénie, elle était le choix évident pour tourner un remake parlant de Violettes impériales. Suzanne Bianchetti reprend donc son rôle dans cette nouvelle version et Georges Peclet remplace André Roanne. La projection presse a lieu le 12 décembre 1932 et les critiques considèrent que le scénario est plus confus que celui de l'original. Peut-être pour rendre le film plus international, le dialogue est en français, anglais et espagnol au début du film et la qualité de l'enregistrement semble être un problème pour comprendre ce qui se dit, même si d'autres le considèrent "parfait". Il est intéressant de noter que la version muette était encore projetée l'année précédente : le 26 septembre 1931, on le montrait encore à Saint Malo, par exemple.

Le 13 septembre, les extérieurs en Espagne et à Compiègne sont terminés et l'équipe s'installe aux studios Braunberger - Richebé de Billancourt jusqu'à début octobre.

Une des dernières scènes de nuit tournées par Henri Roussell semble être l'attentat devant l'hôtel de ville de Montmorency et, ne trouvant pas la première explosion suffisante, il en fait faire une seconde qui explose les vitres de la mairie et réveille plus d'un voisin.

Le film sort à l'Ermitage en première de gala le 12 décembre 1932. On y montre d'abord un "charmant reportage filmé sur le bal de la Comédie française", puis Raquel Meller elle-même vient chanter sur scène et après l'entracte, on projette le film vu ce soir là par Harry Baur, Marie Marquet, Ginette D'Yd, Émile Drain, Charles Burguet, etc. Comœdia conclue : "les violettes ne sont pas près de se faner au jardin charmant de l’Ermitage".
Le 31 décembre au Club du Faubourg, Suzanne, en compagnie d'Émile Drain, Georges Péclet et Robert Dartois, participe à un "débat sur le cinéma et l'histoire, Procès du film Violettes impériales".

Violettes impériales (1932) avec Raquel Meller

Le populaire du 23 décembre 1932 parle de Violettes impériales en ces termes : "Il s'agissait bien d'une œuvre dramatique faite par un habile animateur mais on n'entendait rien. Maintenant le même film est refait et il parle, il chante, il est bruyant et il n'y gagne pas grand chose. (...) Mme Suzanne Bianchetti est douce et très gracieuse, elle joue très juste."
 
Dans Alger étudiant, Gaston Martin écrit même "Suzanne Bianchetti ne me paraît pas avoir d'aptitude pour le parlant : elle est trop théâtrale."

Le début de la fin

De manière générale, les films que Suzanne tourne à l'arrivée du parlant sont soit des remakes de succès passés qui, même s'ils sont globalement bons, sont presque voués à être comparés défavorablement à leurs modèles, surtout lorsqu'on leur a emprunté des images, ou alors de petites productions sans grande ambition autre que le pur divertissement. Même si l'actrice est presque toujours remarquée et trouvée belle (remarquable pour une actrice de 40 ans qui joue souvent des rôles de femmes moins âgées qu'elle) et au minimum très compétente, aucun de ces films ne se compare aux glorieux chefs-d’œuvre dont elle illuminait sa présence dans les années 1920.

Son mari René Jeanne obtient la Légion d'honneur en janvier 1933. Le samedi 18 novembre 1933 Suzanne participe à la semaine du film Belge à Bruxelles avec Madeleine Renaud et Fernand Gravey.

Elle apparaît avec de nouvelles vedettes dans le film Aux portes de Paris, comme Josette Day et Gaby Morlay, qui passe en avril 1935 avec un succès considérable au Gaumont Palace.

Lorsqu'elle reparait à l'écran, elle le fait malgré tout dans un environnement amical et familier : le bon vieux Léon Poirier l'engage pour tourner avec Maurice Schutz, André Nox, Thomy Bourdelle,...
En 1936, elle joue la provinciale romanesque dans un petit rôle de L'appel du silence qui raconte l'histoire de Charles de Foucaud, ermite et martyr du Sahara et de son ami Laperrine. Il s'agit apparemment là du premier film produit par souscription. Cent mille français de toutes conditions ont contribué selon leurs moyens à financer le film.

René Jeanne et Gaston Chérau travaillent également sur une adaptation de Champi-Tortu où Suzanne jouerait le rôle de Jeanne Chevalier.

Un départ soudain

Mais le mardi 20 octobre 1936, Comœdia annonce à ses lecteurs abasourdis en première page. "depuis quelques jours, nous la savions perdue."
Suzanne a en effet subi une opération chirurgicale à laquelle elle n'a pas survécu.
Trois jours plus tard, Le petit Parisien lui rend hommage : "On l'avait surnommé l'impératrice du cinéma. A l'écran, elle interprétait avec une distinction rare ces rôles de grandes dames qui demandent, en même temps qu'un talent de fine comédienne, une suprême élégance. Qui ne se souvient de son rôle de Marie-Louise dans Madame Sans-Gêne, de celui de Catherine II dans Casanova, et surtout de l'impératrice Eugénie dans Violettes impériales ? Elle savait être simple à l'occasion et l'avait prouvé dans Verdun, visions d'Histoire, le beau film de Léon Poirier, où elle incarnait une admirable femme du peuple. Suzanne Bianchetti n'est plus, mais elle continuera à vivre sur l'écran, à travers les magnifiques rôles qu'elle interpréta, et ses amis et admirateurs garderont longtemps le souvenir de la femme exquise qu'elle était dans la vie de tous les jours."

Son mari et ses amis accompagnent son cercueil au père Lachaise après une cérémonie à l'église de la trinité.
Dans son interview à Mon ciné en 1922, elle disait :"Quand je serai très vieille, très vieille, je veux me retirer à la campagne et je ferai de l'élevage entourée d'un monde de chiens et de chats. Mais je vous le répète... seulement quand je serai très vieille..." Son vœu ne s'est peut-être pas réalisé, mais contrairement a bien des actrices de l'époque, son nom restera pour bien des années encore.

Cliquez "j'aime" sur la page Facebook si vous aimez mon blog.
C'est tout pour aujourd'hui les amis ! A bientôt !

Aucun commentaire: