samedi 25 avril 2020

Les tentatives ratées [Et la couleur fut. Les "premiers" films français en couleur (5e partie)]

Pour lire la première partie (les années 20), c'est par ici.
Pour lire la deuxième partie (les années 30), cliquez-ici.
Pour lire la troisième partie (Le mariage de Ramuntcho), cliquez-ici.
Pour lire la quatrième partie (La belle meunière), cliquez-ici.

La généralisation de la couleur

Il faudra attendre 1953 pour que l'usage de la couleur se généralise en France, avec des débuts chaotiques. On peut signaler ainsi le film Violettes Impériales, sorti en décembre 1952 avec Luis Mariano (décidément la couleur ne sert qu'à mettre en valeur les chanteurs d'opérettes ! Il tourne d'ailleurs auparavant "Andalousie" en 1951.) qui est caractéristique du système Gévacolor utilisé sur les premiers films français en couleurs trop fauchés pour utilisé des procédés américains. De nos jours, la pellicule couleur a tellement viré que le distributeur en DVD, René Château a préféré sortir le film en noir et blanc. Vous pouvez juger de ce qu'il reste des couleurs sur le DVD de la version espagnole si vous êtes polyglotte.

On l'a vu, les films précédemment discutés ont connu, soit des genèses mouvementées, soit des obstacles techniques considérables. Mais les cinéastes qui les ont faits sont parvenus à les achever. Ce n'est pas le cas de toutes les tentatives.



Le croisé

Le croisé (ou Les croisés dans son titre initial) est un film qui n'a pas eu la chance d'être terminé. Il a été tourné dans un système, le Splendicolor, dont la chaîne de production complète n'avait pas été testée avant le début des prises de vues. De sorte que, lorsque il est apparu évident qu'on ne pourrait pas exploiter le film, le tournage s'est interrompu au printemps 1929. Il s'agissait pourtant d'un projet ambitieux : l'histoire de la huitième croisade par Saint Louis interprété par Philippe Rolla dans le rôle principal, accompagné de vedettes comme Maxudian et André Roanne et Diana Hart (mentionnée dans Pour Vous du 15 décembre 1928), avec tournage en Tunisie, à Aigues Mortes, etc. Le film était réalisé par Dimitri Kirsanoff, l'excellent Raymond Bernard était à la manœuvre en tant que directeur artistique et Joe Hammam, le fameux cowboy camarguais était l'assistant réalisateur. En vain, la prestigieuse première prévue à l'Opéra Garnier n'aura jamais lieu.
L’épopée de ce film est narrée avec brio dans ce texte de Leslie Dagneaux.
Une action du procédé Splendicolor

Jour de fête


On aurait pu croire que les années auraient contribué à régler le problème du système Keller Dorian mais après la deuxième guerre mondiale, Jacques Tati se lance dans la réalisation de son premier long métrage, Jour de fête, (dont j'avais déjà parlé ici) pour lequel il a prévu toute une évolution de la couleur dans l'histoire grâce au Thomsoncolor, en fait le procédé Keller-Dorian renommé. Prévenu des difficultés de post-production, il assure ses arrières en tournant à deux caméras, dont une en noir-et-blanc. Bien lui en a pris, c'est cette version qui sort en salle. Là encore, on n'a pas pu tirer de copies d'exploitation de qualité.
En 1964, frustré par cette expérience, Tati reprend la version noir et blanc, tourne de nouvelles séquences avec un peintre qui ajoute des couleurs à la ville à mesure qu'il la peint. Naturellement, il s'agit là de la bonne vieille technique du pochoir, et pas de couleur naturelle.
La version couleur a finalement pu être exploité en 1995 lorsque des copies ont pu être tirées en transférant optiquement l'image obtenue sur une pellicule Eastmancolor classique. Ce procédé imparfait a permis l'exploitation en salle et en DVD, mais la qualité n'est apparemment pas suffisante pour en faire un Blu-ray classique. En effet, si la version couleur est bien présentée dans celui actuellement disponible, il s'agit d'une version 720p, là où les versions noir et blanc sont présentées en classique HD 1080p. Cela reste ce qui se trouve de mieux actuellement.
Une scène de la version couleur restaurée.


Quiconque souhaite en savoir plus long sur le tournage, puis sur la restauration du film ne trouvera pas meilleure source que le livre de François Ede "Jour de fête ou la couleur retrouvée".

Lequel est donc le "premier" film français en couleur ? Le premier à avoir été fait ? à être sorti sur plusieurs écrans ? Celui totalement et uniquement français ? Celui avec un procédé à synthèse soustractive ? Je vous laisse décider.

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