vendredi 26 février 2021

Jack [Robert Saidreau - Chapitre 20]

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Affiche du film Jack, avec un dessin d'une mère et son fils

Un drame d'Alphonse Daudet avec Max de Rieux

Adaptation modernisée du roman d'Alphonse Daudet pour Vitagraph, son dernier film, sorti après la mort de son réalisateur, qui se départit ici de son genre de prédilection. Jack est en effet un mélodrame dont le personnage principal se fait persécuter jusqu'à en mourir. On le suit de son enfance, où il est interprété par l'enfant acteur Jean Forest, à l'âge adulte, campé par Max de Rieux que j'ai évoqué récemment comme réalisateur d'une des versions de La belle Meunière de Marcel Pagnol. Celui-ci témoigne dans Comoedia le 3 avril 1925 : "Je vais, avec Jack, sortir des classes où le cinéma semblait m'assigner une place. Je suis déjà tout à mon nouveau rôle qui me séduit tout particulièrement ; c'est un personnage que je 'sens' et que ma joie est grande de réaliser sous l'habile direction de Robert Saidreau."
 
Max de Rieux est en effet déjà connu à l'écran avec deux rôles principaux de films de prestige. Il sort justement d'une autre adaptation du même auteur, réalisé par André Hugon : Le petit chose et du film Les Grands par Henri Fescourt. Son prochain film à sortir est déjà tourné : Comment j'ai tué mon enfant par Alexandre Ryder.
Si l'on en croit Le Gaulois du 8 juin1923 (qui en annonce le tournage)et Comœdia du 3 avril 1925 (qui en annonce la présentation prochaine) il a également tourné avec le même André Hugon un film intitulé Le saphir blanc avec "A. Toulout" (Jean ?), et Mlle Gray (Florence, Irma, Minia, Sylvia ?) d'après une nouvelle de Raymond Genty. Mais je ne trouve plus aucune trace de ce film au delà de ces deux publications. Toujours est-il que l'acteur touche-à-tout, déjà très actif sur scène, passera peu après derrière la caméra pour diriger ses propres films.
Les autres acteurs sont, comme d'habitude et pour partie, habitués à travailler avec Saidreau : André Dubosc revient au moins pour la 4e fois, Yanne Exiane pour la deuxième et terminera sa carrière à l'écran ici, tout comme Suzanne Balco et Émile Garandet qui collaborent avec le réalisateur pour la troisième fois.
Thérèse Kolb n'a a priori jamais joué dans un film du réalisateur, mais elle a partagé l'écran avec lui dans Blanchette, où elle jouait la mère. 
Parmi les nouveaux venus, cependant, il nous faut signaler Alexiane, remarquée dans Le lion des Mogols et qu'on reverra dans Le joueur d'échecs, Roger Tréville qui se fera une carrière dans les opérettes filmées au début du parlant, puis dans le doublage comme voix de James Stewart et Robert Mitchum. Enfin bien sûr deux mousquetaires des films de Henri Diamant-Berger : D'Artagnan - Jean Yonnel (Vingt ans Après) et Porthos - Thomy Bourdelle (Les trois mousquetaires).

Le tournage

Avant de pouvoir se lancer dans cette adaptation, On apprend dans Paris Midi le 13 février 1925 que Saidreau vient de traiter avec les héritiers de Daudet. D'ici le 2 avril, la distribution est arrêtée dans les grandes lignes. On cite notamment une mystérieuse "Mme Ruez" et L'Intransigeant ajoute Jean Forest à la liste le 4 avril et annonce l'iminence du tournage. Le 9 mai, on nous confirme qu'il est commencé depuis un mois et que les intérieurs ont été faits à Épinay-sur-Seine.

Il semble que le tournage se poursuivent au château d'Étiolles. Il se peut qu'il s'agisse là du château du Parc de la Pompadour, dont on trouve en ligne qu'il a été racheté en 1908 par un propriétaire qui l'a fait détruire. Si c'est bien le cas, la bâtisse était toujours debout en 1925.
Les extérieurs sont ensuite prévus à Indret, une île située à l'époque en Loire Inférieure, aujourd'hui en Loire Atlantique, où se trouve une ancienne fonderie et où se situe le roman. Le 30 mai, les extérieurs sont terminés selon L'Intransigeant. Selon Le Petit Parisien, c'est chose faite depuis le 1 août.
Saidreau, Forest, Yonnel, Dubosc et Exiane sur le plateau de Jack
Yonnel, Dubosc, Forest, Exiane et Saidreau sur le plateau de Jack

Sortie

Paris Midi du 28 octobre 1925 nous apprend que le film sera projeté au Marivaux de Bruxelles et dans toute la belgique vendredi (donc le 30 octobre 1925). Ce qui signifie que celui-ci a donc été exploité en Belgique avant la France, où la présentation corporative n'a lieu que le 24/11/1925 d'après Paris Midi.
 
Seulement voilà, coup de tonnerre, le 5 décembre 1925, Robert Saidreau meurt. La presse de l'époque lui prête 50 ans, bien qu'il semble n'en avoir eu que 48.
 
Ce n'est que le 22 janvier 1926 que Jack sort au Palais des fêtes et l'ami du réalisateur René Jeanne estime dans Le petit Journal sorti ce jour là que "Jack va certainement connaître un bon succès d'émotion.". On trouve ensuite le film entre autres le 21 mars, à l’Éden de Vincennes, puis le 23 avril à l'Odéon de Marseille.
Entre temps, le 20 février 1926, un journaliste de l'Intransigeant regrette que le nom de Saidreau ne figure même pas sur une affiche du film qu'il a vue.
Le 6 novembre 1925, dans Cinémagazine, on peut admirer une belle affiche du film reproduite en double page couleur où le nom de Saidreau est clairement visible.

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