lundi 15 février 2021

Monsieur le directeur [Robert Saidreau - Chapitre 19]

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Un vaudeville pour Vitagraph

Après un passage à vide avec deux films tournées et pas encore sortis et un autre tourné mais qui ne sortira jamais, Robert Saidreau aborde une comédie de Fabrice Carré et Alexandre Bisson pour la compagnie Vitagraph comme l'annonce L'Intransigeant le 28 juin 1924. Monsieur le Directeur raconte l'histoire de Lambertin (Paul Ichac), employé du ministère de l'Intérieur, qui vit avec sa femme Gilberte (Madeleine Martellet) et sa belle-mère Mme Mariolle (Marthe Lepers) une ancienne cartomancienne dont l'autre fille, Suzanne Anderson (Claire Nobis), revient veuve et riche des États-Unis. Là dessus débarque M. Bouquet (André Dubosc), collègue de Lambertin, qui lui annonce l'ouverture prochaine d'un poste de sous-préfet. Mais le directeur de La Mare (Jean Dax), seul décisionnaire, n’offrirait le poste qu'en cas d'intervention de Gilberte ce que Lambertin, jaloux, refuse catégoriquement. C'est finalement Mme Mariolle qui tentera sa chance auprès du directeur pour son beau-fils.
Seulement voilà, non seulement le directeur a décidé de cesser ses batifolages, mais en plus, l'âge relativement avancé de la dame et ne lui donne pas de mal à résister à ses sollicitations. Arrive ensuite Suzanne, qui se fait passer pour Gilberte Lambertin et qui ne laisse pas le directeur de marbre. Elle sauve sa vertu en sonnant le personnel aux moments critiques et parvient à décrocher le poste convoité pour Lambertin.
Problème : une fois ce dernier installé dans son poste, M. de La Mare lui rend visite à la sous-préfecture et s'ensuivent les quiproquos qu'on imagine lorsqu'on lui présente la vraie Mme Lambertin. Il pense confondre Suzanne en lui proposant le mariage si elle est bien celle qu'elle prétend. Naturellement, Suzanne accepte et épouse le directeur.
Une dame âgée tente de récupérer la pile d'assiettes que tient un homme chauve.
M. Bouquet s'invite à déjeuner chez Mme Mariolle


Distribution


Ce film a pour particularité de rassembler plusieurs acteurs et actrices qui resteront célèbres plusieurs dizaines d'années après. Tout d'abord, Arlette Genny qui sous le nom de Marie Glory connaîtra la tête d'affiche avec les plus grands réalisateurs tels Julien Duvivier (Le paquebot Tenacity), Henri Fescourt (Monte-Cristo) et Roger Vadim (Et Dieu... créa la femme). Pierre Larquey semble signer ici son unique rôle à l'écran de la décennie 1920 mais deviendra un des seconds rôles les plus populaires de l'écran français, avec même parfois des premiers rôles comme dans l'un des premiers films en couleurs français, La terre qui meurt.
Un homme tente d'attirer l'attention d'un autre qui converse avec une dame âgée dans un bureau.
Lucien Baroux, Jean Dax et Marthe Lepers


Lucien Baroux débute avec ce film, lui qui restera hyperactif sur le grand, puis le petit écran jusque dans les années 1960. Il tient donc là son premier rôle à l'écran (excepté un tournage où il avait été mis à la porte par Camille de Morlhon). Il s'en souviendra plus tard (le 11 octobre 1941 dans Vedettes) comme d'un tournage d'avant-guerre tellement l'expérience du film muet lui semblait lointaine.
Pierre de Ramey, ici dans le rôle du neveu, s'exportera bientôt aux États-Unis pour tourner des films en français à Hollywood, notamment aux côtés de Maurice Chevalier.

Dans les acteurs habitués à travailler avec Saidreau, on retrouve Louis Pré Fils, qui a participé à tous les Films Diamants précédents, mais aussi Émile Garandet, déjà présent dans Cœur Léger, ce qui est également le cas de Suzanne Balco. André Dubosc a déjà joué dans L'idée de Françoise, et dans Bonheur conjugal. Et la vedette de La nuit de la Saint Jean, Jean Dax, revient ici pour jouer le directeur du titre.
Cependant, celle qu'on retrouve en couverture du journal Cinémagazine le 28 novembre 1924 et le 8 mai 1925, et de Cinéa - Ciné Pour Tous le 15 février 1925 est Madeleine Martellet, qui joue Gilberte et que l'on ne reverra qu'une deuxième et dernière fois dans un film avec Huguette Duflos intitulé Yasmina.
Portrait d'une jeune femme songeuse avec un chapeau cloche.
Madeleine Martellet


Enfin, il est intéressant de noter qu'une petite "flapper" française dont on ne pourra pas encore entendre la voix enfantine dans ce film, y fait sa première apparition. Il s'agit de Christiane Virideau, qui épousera plus tard Jacques Tourneur, et ira vivre à Hollywood avec lui, et y décrochera le rôle de Blanche Neige dans la version française du dessin animé de Walt Disney.

Tournage et sortie

C'est aux studios d’Épinay-sur-Seine que Saidreau réalise son film.
L'Intransigeant nous annonce le tournage commencé le 19 juillet 1924, rapporte une grande scène de nuit dans une immense piscine le 26 juillet, et enfin annonce le tournage terminé le 4 octobre. Une fin déjà annoncé depuis le 24 août dans Cinémagazine. Un an après, le 22 août 1925, L'Intransigeant nous offre une minuscule photo sur laquelle on peine à reconnaître qui que ce soit, mais un curieux entrefilet nous la décrit comme étant Saidreau qui admoneste Madeleine Marthellet et Claude Ryce qui se reposent sur un grand lit entre deux prises dans le studio. Claude Ryce ne fait a priori pas partie de la distribution, ce qui pourrait indiquer que le tournage d'un film de Gaston Roudès (La douleur ou La maternelle) a dû être réalisé en même temps que le film de Saidreau.
Robert Saidreau, Madeleine Martellet et Claude Ryce


La présentation presse a lieu le 27 octobre, à la suite de quoi le journal publie une critique positive. Ainsi qu'une citation de Saidreau : "Le côté humoristique d'un film comique doit laisser percer l'émotion; c'est dans la mesure de cette opposition qu'on réalise une bonne comédie."
Albert Bonneau décrit dans Cinémagazine du 7 novembre 1924 une nouvelle réalisation "très humoristique" et nous gratifie même d'une photo. Le film sort le 23 janvier 1925 au Grand Cinéma Bosquet, au Palais Rochechouart et au Palais des Fêtes.
Portrai d'une jolie jeune femme blonde
Un autre portrait de Madeleine Martellet

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